En septembre 2023 les seuils d’accès à l’aide judiciaire vont faire leur dernier saut vers le haut. Un isolé aura accès à l’avocat gratuit, ou presque, si son net mensuel est inférieur à 1900 €
Et ceci dans un souci de garantir l’accès au juge.
Ah oui ?
A partir du moment où la gratuité des services d’avocat est acquise à la majeure partie de la classe moyenne, l’Etat a collectivisé le marché de la représentation en justice par avocats via les Bureaux d’Aide Juridique locaux. Et cette collectivisation est régulée sur base d’un tarif de rémunérations forfaitaires à l’acte de procédure : une citation vaut deux points, soit environ 160 €. Des conclusions ? 240 €. Une audience de plaidoiries ? 160 €. Et ainsi de suite.
On peut considérer qu’une procédure judiciaire brûle environ 20 points. Observons aussi que par affaire on peut « vendre » un maximum de trois consultations de cabinet. En gros celle où on reçoit les pièces, celle où on les rend et une au milieu avant les plaidoiries. Chouette tout ça.
Une étude récente à chiffré qu’une maison juridique regroupant 4 avocats salariés ayant chacun un net mensuel de quelques 3 300 € nécessiterait de mobiliser 720 000 € par an. Quatre avocats « B.A.J. » payés aux points devraient produire annuellement 9 000 points pour mobiliser ce budget.
9000 points c’est générer et traiter + /- 450 procès par an.
A supposer la demande en amont, y a-t-il des juges en aval ?
D’autant qu’un tarif à l’acte rémunère la forme et pas le fond. Je n’ai pas vu beaucoup d’avocats sérieux établir leurs conclusions en moins de deux jours. Or à 240 € le jeu de conclusions, juste pour survivre, il faudra faire quatre fois plus vite. Qui va devoir travailler sur base de conclusions insuffisantes ? Le juge, pardi ! Et qui ne reconnaîtra pas son histoire quand elle sera plaidée ? Le justiciable, tiens !
Et puis un tarif à l’acte invite à démultiplier les actes. C’est une prime aux procéduriers et autres faiseurs d’incidents.
J’espère que l’Etat pense aussi à démultiplier les greffiers et le cadre des magistrats. Sinon le droit à la justice prendra la forme d’une gigantesque queue de justiciables, dont aussi les payants, en attente de jugement. Sauf qu’il n’y a pas d’électeurs pour voter pareille dépense publique.
On vous parlera des success stories des Legal Houses au Canada ou en Ecosse. Il n’y aurait pas du pétrole dans ces coins-là, des fois ? Ouh les tricheurs !
Allons enfants de la patrie, il reste un avenir positif à construire avec Arbitrall ! Ce n’est pas pour rien que nous poussons cette justice civile alternative. Et au bout du compte, nul ne regrettera ni les couloirs décrépis du Palais ni ses toges défraichies.
Car si on pense autrement on avance. On règle les problèmes plutôt que d’en créer de nouveaux.
Bonne année aux enthousiastes d’un monde nouveau.